Les unités pour malades difficiles (UMD) en France sont des établissements psychiatriques spécialement conçus pour traiter les patients présentant des comportements violents ou dangereux. Souvent méconnues du grand public, ces unités jouent un rôle crucial dans la gestion des troubles mentaux sévères et dangereux. Elles sont rattachées à des hôpitaux et dotées de mesures de sécurité renforcées pour protéger autant les patients que le personnel soignant.
Le rôle et le quotidien des UMD
Laurent Layet, un psychiatre qui a passé quinze ans à l’UMD de Montfavet, offre un éclairage précieux sur le fonctionnement et les enjeux de ces unités dans son livre intitulé Au pays des ombres. Voyage au cœur de la folie. Dans son récit, Layet met en lumière la complexité du traitement des patients classés parmi les plus dangereux de la société française. Le quotidien des soignants dans ces unités est intense et requiert une adaptation constante face à des patients souvent en lutte contre eux-mêmes et les autres.
Des patients aux parcours complexes
Les patients admis dans les UMD arrivent avec des histoires personnelles souvent marquées par des actes de violence ou de délits graves. Certains ont été déclarés pénalement irresponsables, tandis que d’autres ont un passé judiciaire étoffé. Dans son livre, Laurent Layet évoque le cas d’Andy, un adolescent qui a tragiquement tué ses parents et ses frères, illustrant les drames familiaux et personnels qui conduisent à ces situations extrêmes.
Cependant, tous les patients des UMD ne sont pas forcément passés par la case prison. Beaucoup d’entre eux n’ont pas d’antécédents judiciaires mais souffrent de troubles mentaux sévères susceptibles de les rendre dangereux pour eux-mêmes ou pour autrui. La prise en charge dans ces unités est souvent la dernière solution pour prévenir de nouveaux passages à l’acte et offrir un cadre sécurisé pour leur traitement.
Comprendre au-delà du jugement
Le travail des psychiatres comme Laurent Layet ne se limite pas à diagnostiquer et prescrire des médicaments. Il s’agit également d’écouter et de comprendre des paroles qui peuvent être déroutantes ou inquiétantes. Layet partage une méthode axée sur le calme, la lenteur et le respect, insistant sur le fait qu’il ne s’agit pas d’excuser les gestes mais de chercher à comprendre la souffrance e son origine.
Dans son livre, Layet souligne que, bien que la violence soit souvent associée à la maladie mentale dans l’opinion publique, la réalité est plus nuancée. Il rappelle que l’écrasante majorité des personnes souffrant de troubles mentaux graves ne sont pas violentes. C’est un préjugé que son travail et celui de ses pairs s’efforcent de déconstruire au quotidien. En effet, à peine 1% des personnes avec un trouble tel que la schizophrénie passent à l’acte violent.
Un travail d’équipe indispensable
Dans ces environnements hautement susceptibles, le travail d’équipe est essentiel. Laurent Layet insiste sur l’importance de la coopération entre toutes les personnes intervenant dans l’UMD, depuis les médecins jusqu’au personnel de nettoyage. Chacun joue un rôle clé dans l’observation et la prévision d’une éventuelle crise. La vigilance quotidienne peut prévenir des tensions qui pourraient autrement dégénérer en violence.
Réinsertions réussies malgré le passé
Contre toute attente, certaines histoires se terminent par un retour à une vie « normale ». Cela a été le cas pour Andy, qui après avoir passé plusieurs années en UMD pour le traitement de son traumatisme est parvenu à devenir ingénieur. Ces réussites montrent que, même pour des profils affichant une telle dangerosité à leur entrée, une évolution positive est possible grâce à l’accompagnement adapté et prolongé que fournissent les UMD.
Laurent Layet a quitté l’UMD en 2018, mais continue de travailler comme expert judiciaire et auprès des enfants et adolescents dans des structures spécialisées, décidant d’intervenir le plus tôt possible pour réduire le besoin potentiel futur de placements en UMD. Ses efforts soulignent l’importance d’une prise en charge préventive et déstigmatisée des troubles mentaux.
La démarche pionnière des UMD et leurs résultats réussis ou probants changent progressivement la perception publique des maladies mentales les plus graves. En fournissant une alternative à l’incarcération pure et simple, cela apporte une vision plus humaniste de la psychiatrie, axée sur la compréhension et le soin des patients. Les travaux de professionnels comme Laurent Layet sont essentiels pour éclairer les enjeux complexes liés à la gestion de ces troubles mentaux et pour inspirer les politiques publiques futures.