La participation citoyenne est de plus en plus reconnue comme un facteur crucial pour le développement et l’implémentation d’une santé publique efficace. Dernièrement, cette approche collaborative a pris une place de choix dans la revue de Santé publique France, La Santé en action, qui consacre un dossier à cette dynamique participative en mai 2025. Cet article explore les divers exemples et innovations mettant en lumière l’engagement direct des citoyens dans les affaires sanitaires.
La démocratisation de la santé : un enjeu majeur
Le mouvement vers une démocratie sanitaire s’enracine dans la volonté d’intégrer les citoyens dans les décisions qui touchent à leur bien-être. Depuis la loi de mars 2002, qui a formalisé l’engagement des usagers dans le système de soins, diverses initiatives ont été amorcées pour renforcer cette inclusion. Le slogan iconique « Rien pour nous sans nous », issu des mouvements de lutte contre le sida, a cristallisé cette aspiration à une participation active des malades et usagers.
Les savoirs expérientiels : un atout sous-exploité
Les compétences développées par les citoyens à travers leurs propres expériences de la maladie, du handicap ou de l’exclusion sociale, souvent qualifiées de savoirs expérientiels, sont de grandes valeurs pour le milieu médical. Ces connaissances, distinctes mais complémentaire des savoirs académiques, sont aujourd’hui de plus en plus sollicitées pour améliorer l’accompagnement des patients. Par exemple, des « patients partenaires » animent des ateliers d’éducation thérapeutique et participent à la formation des futurs médecins. En Belgique, des « experts du vécu en pauvreté » contribuent à rendre les services publics plus proches des personnes vulnérables.
Création de synergies entre savoirs
L’enrichissement du domaine médical par les savoirs expérientiels ne se limite pas à des initiatives isolées. La notion de « justice cognitive », défendue par l’anthropologue Shiv Visvanathan, réfute la suprématie d’un type de connaissance sur un autre. Cet concept encourage une approche collaborative, comme on l’a vu aux Pays-Bas où l’Institut national de la santé publique et de l’environnement a incorporé des groupes citoyens dans sa prospective sur la santé publique 2024.
En France, la participation communautaire est encouragée par des études directes telles que Enabee sur la santé mentale des enfants, où des acteurs variés tels que des enseignants, parents et professionnels de santé sont impliqués. Des initiatives se développent aussi en Nouvelle-Aquitaine, avec des études participatives sur la population des Gens du voyage, assurant ainsi une réponse adéquate et inclusive des politiques de santé.
Des innovations marquantes
Les citoyens s’engagent particulièrement dans les questions de santé environnementale, exigeant transparence et implication dans les études. À Marseille, une démarche inédite a permis l’association des citoyens à une étude d’impact sur la qualité de l’air. De même, dans le bassin industriel de Lacq, l’interaction avec les riverains enrichit les études de Santé publique France grâce à leurs savoirs locaux. Aux Antilles, face à l’impact du chlordécone, une approche participative a permis de renouveler les messages de prévention.
Cependant, ces moyens restent sous-utilisés face à des obstacles conséquents : les démarches participatives sont souvent perçues comme coûteuses en temps et en ressources, et les questions d’inclusion et de représentativité des publics peuvent compliquer leur mise en œuvre efficace. Malgré ces défis, le potentiel de ces initiatives à transformer la santé publique est indéniable.
Un avenir prometteur pour la santé collaborative
La participation citoyenne dans la santé publique pourrait bien être la clé de son évolution future. Alors que les initiatives continuent de se développer, le défi essentiel sera de garantir leur pérennité et leur efficacité en surmontant les obstacles liés aux ressources et à l’inclusion. C’est une période de transformation passionnante où chaque citoyen peut potentiellement apporter sa pierre à l’édifice d’une santé publique plus juste et efficace.