À compter du 1er juillet, la Bretagne franchit un cap décisif en mettant en place une interdiction stricte de fumer sur les plages et dans les parcs, particulièrement ceux fréquentés par des enfants. Cette mesure, saluée par de nombreuses associations antitabac, vise à protéger les plus jeunes du tabagisme passif et à dénormaliser la consommation de tabac dans les lieux publics.
Une mesure attendue mais incomplète
La ministre de la Santé, Catherine Vautrin, a expliqué que cette interdiction s’inscrit dans le cadre d’un vaste programme national de lutte contre le tabagisme. Elle a précisé lors d’une interview que les lieux concernés incluent également les abords immédiats des écoles. Toutefois, une absence notable dans cette liste est celle des terrasses de cafés et restaurants, lieu de débat particulièrement animé sur la scène publique.
Loïc Josseran, président de l’Alliance contre le tabac, exprime sa frustration face à cette exclusion des terrasses. « Nous continuons d’exposer non seulement les non-fumeurs, mais aussi les employés de la restauration au tabagisme passif, » déclare-t-il. Il ajoute que les arguments de liberté individuelle avancés par certains ne devraient pas passer avant le droit à un air pur.
Impact sur les restaurateurs et la clientèle
Les associations antitabac, en réponse aux inquiétudes économiques, soulignent que de nombreux restaurateurs ayant opté pour une politique de non-fumée n’ont pas subi de pertes financières. « En réalité, cela a souvent amélioré l’atmosphère global de l’établissement », cite Alexandre Markovic de Demain sera non-fumeur. Une analyse de santé publique montre que près de 70 % de la population préférerait des terrasses sans fumée.
Depuis 2019, le projet « Ma terrasse sans tabac » recense des établissements volontaires souhaitant avancer vers un avenir sans tabac. Les résultats ont montré que la réduction du tabagisme dans ces zones n’a pas repoussé la clientèle ; au contraire, elle a souvent attiré de nouveaux consommateurs en quête d’environnements plus sains et familiaux.
Protection de l’enfance ou prétexte pratique?
Malgré la bonne intention de protéger les enfants, certains experts s’interrogent sur le message envoyé. Delphine Tharaud, professeure de droit privé, signale que restreindre les lieux où la cigarette est permise peut conduire à une polarisation sociale. Elle explique que l’argument selon lequel ces interdictions servent à protéger les jeunes pourrait sous-entendre que les enfants sont indirectement responsables de ces restrictions.
Néanmoins, la majorité du public et des spécialistes soutient cette mesure, estimant qu’elle aidera à établir une norme sociale plus saine. Le véritable adversaire de ces politiques, affirment les militants antitabac, reste l’industrie du tabac elle-même, que beaucoup accusent de contrarier les politiques publiques par des campagnes de désinformation.
Vers une décommercialisation progressive?
L’objectif de ces initiatives est de préparer le terrain pour des mesures peut-être plus drastiques à l’avenir, comme une « décommercialisation progressive » du tabac. Inspirée par des réflexions en cours en Angleterre, cette stratégie pourrait envisager d’augmenter progressivement l’âge légal pour acheter des produits du tabac jusqu’à leur interdiction.
Pendant ce temps, la Bretagne continue d’ajuster ses réglementations, espérant ainsi influencer d’autres régions à adopter des mesures similaires. Les discussions concernant une future interdiction totale de la cigarette sur les terrasses pourrait resurgir dans les années à venir, incitant à revoir les pratiques sociales en matière de consommation de tabac.